mercredi 28 septembre 2011

L'effet kiss pas cool

L’effet kiss pas cool de Leslie Plée
Édition Jean-Claude Gawsewitch

Leslie Plée avait déjà fait parler d'elle avec sa première BD Moi vivant, vous n'aurez jamais de pauses (ou comment j'ai cru devenir libraire) ou elle nous décrivait sur un ton très ironique son expérience de conseillère de vente en livres dans une grande surface spécialisée (type FNAC). 

Dans ce "journal d'une angoissée de la vie", Leslie Plée nous déroule la longue liste des peurs et névroses qui l'ont hantée depuis son enfance, et qui, pour certaines, la poursuivent encore aujourd'hui. Avec beaucoup d'humour, elle nous relate ses rencontres avec des psys incompétents, avec d'autres personnes souffrant des mêmes symptômes, sans parler des actes totalement loufoques qu'elle s'oblige à faire à cause des ses peurs incontrôlables...
Elle se moque d'elle-même pour dédramatiser la situation et nous renvoie à nos propres angoisses improbables (peur des pigeons, peur de prendre le métro...) et quelquefois ridicules.

J’ai beaucoup aimé l’honnêteté dont fait preuve Leslie Plée face à ses névroses. J’ai adoré les couleurs douces employées et les dessins un peu naïfs. Mais c’est surtout son sens de l’humour et de l’autodérision à toute épreuve qui m’a totalement conquise. C'est drôle et décalé, une bouffée d’air frais dans le monde des dessinatrices-bloggeuses.

Je ne sais pas si vous le savez, mais Leslie Plée a un blog. Elle ne poste pas très souvent, par contre, ses notes sont toujours très réussies et désopilantes!
http://vuedelaprovince.canalblog.com

dimanche 25 septembre 2011

Les souvenirs

Les souvenirs de David Foenkinos
Éditions Gallimard

Quand s'ouvre le récit, on fait la rencontre du narrateur, ce personnage dont on ne connaîtra finalement ni le nom, ni l’âge. C’est le jour de l’enterrement de son grand-père, et s’en suivra un récit de plusieurs mois qui nous embarque dans ces moments de la vie qui nous bouleversent. Sa grand-mère sera mise contre son gré dans une maison de retraite, ses parents supportant mal leur nouveau statut de retraités sombrent dans la dépression. L’auteur va nous faire partager les moments de la vie de ce jeune homme qui vont l’amener à prendre conscience de l’importance des souvenirs et de la transmission.

J’ai été vraiment ému par ce livre, et certains passages ont eu un écho particulier; on est pris au coeur, ce n'est pas notre histoire et pourtant on referme le livre avec un sentiment de familiarité étrange vis-à-vis de ces moments de vie.
Et puis il y a tous ces souvenirs qui abondent dans ce livre. En effet, le récit est entrecoupé de brefs chapitres, évocations drôles ou touchantes, des souvenirs de Fitzgerald, Gainsbourg, Gaudi, Kawabata... en relation avec la mémoire et l'oubli.

David Foenkinos nous avait laissé sous le charme joyeux de La délicatesse. Le ton de ce nouveau roman est d'abord plus grave, l'évocation de la vieillesse et de la perte de l’autonomie est juste et sombre. Mais, l'humour et le sens de la dérision reprennent vite le dessus. Tout y décrit avec douceur, sans que l'on ne sombre dans un sentimentalisme exagéré
Ce qui est sûr c’est qu’avec Foenkinos, on sait ce qui nous attend : situations tragi-comiques et un phrasé absolument génial qui n’a pas d’équivalent pour décrire les situations absurdes du quotidien. Fidèle à son habitude, il n’hésite pas à glisser quelques tirades sur les pavillons de banlieues, la poésie des aires d’autoroute ou l’influence des Twix sur la vie amoureuse des gens : un régal !

samedi 17 septembre 2011

La couleur des sentiments

La couleur des sentiments
de Kathryn Stockett
Éditions Jacqueline Chambon

Nous sommes en 1962. Dans quelques mois, Martin Luther King organisera sa marche sur Washington pour défendre les droits civiques. Mais à Jackson, Mississipi, les mentalités n’ont pas encore évolué. On ne va pas dans les mêmes écoles et l’on croit encore que les noirs répandent de graves maladies par les toilettes.
C’est dans ce contexte que Skeeter, une jeune bourgeoise blanche, et deux bonnes noires, poussées par une profonde envie de voir les choses changer, et malgré leurs différences et les risques qu’elles encourent, vont unir leurs destins, et en secret écrire une histoire bouleversante, témoignant du travail, de la vie et des conditions des domestiques noires.

Le point fort de ce livre, c’est, sans conteste, les personnages poignants. Ils sont inoubliables et remarquablement croqués par l'auteur. Que ce soit Miss Skeeter qui devant l'iniquité des lois raciales est prête à se mettre à dos ses amies et sa famille pour essayer de bouger les choses, ou  Aibileen, la bonne qui a toujours tenu sa langue pour éviter les ennuis et qui grâce à l'écriture du livre va s'affranchir ou encore Minny, son amie grande gueule, qui a du mal à garder un travail.
Mais c’est aussi une satire des familles bourgeoises du Mississipi, celles qui ne pensent qu’au paraître, au rang social et au qu’en dira t-on. Mais l'auteur ne fait pas le procès des blancs, elle nous raconte simplement une tranche d’histoire se basant sur sa propre enfance.

À chaque fois qu’on ouvre ce roman, on se retrouve propulsé dans les années 60 à Jackson et l’on peut sentir la chaleur moite et la tension quotidienne du Mississipi.

Sans tomber dans le pathos, Kathryn Stockett livre une histoire qui se chante à trois voix à la fois authentiques et émouvantes…et parfois même, drôle.

samedi 10 septembre 2011

Rosa Candida


Rosa Candida de Audur Ava Ólafsdóttir
Éditions Zulma

Arnljotur est un jeune homme de 22 ans qui essaie de faire le deuil de sa mère récemment décédé dans un accident de voiture. Entre elle et Arnljotur existait un lien : le jardin et la serre où elle cultivait une variété rare de Rosa candida à huit pétales. C'est là qu'une nuit il a aimé Anna et l'a mise enceinte. Quelques boutures de rose dans son sac, il va les paysages crépusculaires de l'Islande pour gagner un monastère afin de redonner vie à sa roseraie légendaire. Ce projet un moyen de prendre le large, de couper les liens serrés qu'il entretient avec son père octogénaire et son frère jumeau, autiste.
Son voyage initiatique va lui faire goûter aux joies de la vie, lui faire prendre conscience de son corps, de son être et de son entourage. Candide moderne, il va découvre la vie, aidé de personnages insolites tel que frère Thomas, un moine cinéphile ou Rosa Sol sa fille qu’il ne connaît pas et qu’il va voir débarquer au monastère.

C'est un bien curieux livre que ce Rosa Candida mais qu'il a été enivrant et plaisant de le lire ! On plonge dans une atmosphère assez loufoque avec ce jeune homme qui commence une sorte de formation de la vie. L’auteur scrute et dissèque les états d'âme du jeune homme pour le mettre totalement à nu. Et l’on s'attache vraiment à notre héros candide et maladroit que l’on voit aller doucement vers l’âge adulte. Il est rare, dans la littérature, de traiter, avec beaucoup de tendresse et d'humour à la fois, de la naissance du sentiment de paternité.

Ce livre est d'une écriture simple, sans artifice et qui décrit les gestes du quotidien avec légèreté. Tout imprégné de l’amour des fleurs et des roses en particulier, ce texte généreux est rempli de la fraîcheur du personnage principal, profondément touchant et attendrissant. Un roman lumineux, qui parle simplement de choses essentielles : comment trouver sa place, comment donner et recevoir de l’amour.

Ce premier roman de la jeune islandaise Audur Ava Ólafsdóttir est plein de poésie, de charme et d’humour et nous dépayse complètement.
Un gros coup de cœur à lire et à relire.

mercredi 7 septembre 2011

1984

1984 de Georges Orwell
Éditions Gallimard


Écrit en 1948 par un homme mourrant, 1984, pièce maîtresse de l’œuvre de George Orwell, est une référence  du roman d’anticipation. Un livre qui me tient à cœur car c’est le premier livre de science-fiction que j’ai lu, celui qui m’a  fait changer d’avis sur ce genre littéraire.

Dans le monde futur de 1984, le monde a été divisé en 3 grandes puissances qui sont chacune gouvernées par des régimes totalitaires. L’Europe et l’URSS sont sous la coupe d’un dictateur omniprésent représentée par la figure de Big Brother. À Londres, Winston Smith, un simple fonctionnaire du Ministère de la Vérité, ouvre les yeux malgré lui et cherche à comprendre ce qui se cache derrière Big Brother. Sa rencontre avec la belle Julia, un autre agent du parti, va le précipiter dans une rébellion contre le parti.

Orwell décrit ici une société hyper surveillée grâce entre autres à la technologie : des écrans qui vous surveillent constamment, épient vos moindres faits et gestes... Aucune place n’est laissée à la liberté individuelle.
Mais au-delà de la télé-surveillance permanente, ce qui m’a le plus effrayé c’est  l'impossibilité du souvenir. En effet, l’histoire est réécrite chaque jour pour qu’elle soit conforme au présent si bien que les citoyens ne peuvent que croire les autorités quand elles disent que cette société est plus heureuse que dans le passé. 

Roman très sombre et pessimiste (Orwell n’était sans doute pas confiant en l’avenir en 1948…), 1984 dépassera toutes les époques, le texte a toujours toute sa force et est devenu intemporel. Un texte déstabilisant par son contenu mais aussi par son texte assez « lourd » et notamment certains passages fastidieux.

60 ans après sa publication, ce roman qui se déroule maintenant dans notre passé, reste un très grand roman d'anticipation.